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Les Verts ont-ils fait une erreur ?

Les Verts ont-ils fait une erreur ?

Faut-il reprocher à EELV d'avoir tenté de forcer la main à François Hollande dans le débat sur le nucléaire?

Depuis la signature de cet accord, j'entends tout et son contraire, les uns faisant valoir qu'il y a là une erreur politique, les autres qu'ils ont provoqué le débat (l'engagement de François Hollande de fermer 24 centrales n'est pas anodin pour un productiviste qui n'est pas insensible au lobby nucléaire).

Mais quelle que soit notre appréciation sur cet accord, ne faut-il pas dépasser la polémique?

En effet, en France, ce n'est jamais le bon moment, ni la bonne façon d'ouvrir un débat qui est totalement verrouillé par un lobby nucléaire puissant. Depuis 60 ans, si ce sujet n'avait pas été soustrait au plus élémentaire débat démocratique, la question ne surgirait pas aujourd'hui au détour d'une négociation préélectorale.

Dans les années 60, qui ont vu l'effondrement de l'empire Français, le projet du nucléaire a été voulu par De Gaulle comme un levier pour imposer l'influence de la France dans le monde en la dotant d'une industrie nucléaire civile et militaire forte. Le résultat est que, sans l'ombre d'un débat ni d'une quelconque réflexion démocratique, notre pays a confié à un petit groupe d'hommes d'affaires près de 80% de notre production énergétique et depuis 5 décennies, la France est une exportatrice peu scrupuleuse d'une technologie à haut risque un peu partout dans le monde.

 

Mettre en avant le risque d'un séisme à Fessenheim ou le crash d'un avion sur Tricastin n'est certainement pas le meilleur argument, il y aura toujours un Claude Allègre pour nous dire que le risque est partout...

Mais l'argument des déchets radioactifs (qui ne relève pas de la probabilité d'un quelconque risque) est plus sérieux. Notre seul parc de centrales produit 1200 tonnes de déchets hautement radioactifs par an, dont on ne sait que faire, si ce n'est les enfouir pour des dizaines de milliers d'années et de confier la surveillance de ce gigantesque stock à nos futurs enfants... Qui peut dire que demain, sans débat, le Limousin ne sera pas un futur dépotoir nucléaire?

Le clou est si profondément enfoncé qu'on ne l'extraira pas sans douleur. Et pourtant il faudra bien sortir du nucléaire et il est urgent d'en convaincre l'opinion.

 

L'autre aspect du débat est encore plus complexe, par quoi remplacer les 58 centrales nucléaires ? La solution est-elle de construire une nouvelle génération de centrale(EPR) repoussant un peu plus le problème? Ou un retour aux centrales à Charbon ou au Gaz produisant du CO2 responsable du dérèglement climatique ? Ou par un retour à la bougie dans les foyers? Et en plus, que vont devenir les centaines de milliers de salariés de la filière nucléaire ?...

N'est-il pas temps de commencer à poser les problèmes, une campagne des Présidentielles, n'est -ce pas le lieu, le moment où justement les grands débats doivent surgir ?...

 

A l'heure où s'ouvre en Afrique du Sud la nouvelle conférence mondiale de l'ONU sur le réchauffement climatique, nombreux sont ceux qui parlent de la modification de comportement nécessaire pour demain. Mais comment, si l'injustice sociale demeure la règle, peut-on proposer la nécessité de faire évoluer notre société vers une ''décroissance '' maitrisée ou plus exactement vers une plus grande sobriété dans la consommation...?

Si tout se tient, il faut faire attention à ne pas surdimensionner le débat au point de le rendre inabordable, mais c'est bien aujourd'hui, sans attendre, qu'il convient de poser le problème de la sortie du nucléaire, tout en étant capable de l'inscrire dans une autre vision sociale et en donnant à nos concitoyens des assurances concrètes sur les questions de l'emploi et du prix de l'énergie pour demain.

Il y a moult raisons d'insatisfaction concernant l'accord PS/EELV qui justifient largement qu' EELV continue à expliquer ses propres positions mais la solution à ces vraies questions ne peut pas être la fuite en avant en se fermant les yeux comme le proposent l'UMP et la droite dans son ensemble ou encore la simple demande des Communistes de créer un service public de l'énergie comprenant le nucléaire ou, cerise sur le gâteau, ce beau référendum proposé par nos amis du Front de Gauche pour dépasser, le temps d'une campagne, leur incapacité à définir une position commune, reportant ainsi l'indispensable débat à une vague promesse pour ''plus tard, si nous avons le pouvoir''.

 

Ce changement que nous voulons pour 2012, cette société que nous appelons de nos vœux, alliant démocratie, justice sociale et sobriété ne pourra voir le jour en ignorant la question de notre dépendance actuelle vis à vis de nos ressources énergétiques.

Faute d'oser clairement aborder ces problèmes ne va-t-on pas dramatiquement les subir demain ?